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Économie Vie locale

Acheter le logement, en louant le foncier

Ciseaux en main, le ministre du logement, Julien Denormandie, inaugure cette résidence au mécanisme juridique innovant © CP

Ciseaux en main, le ministre du logement, Julien Denormandie, inaugure cette résidence au mécanisme juridique innovant © CP

Le ministre du logement Julien Denormandie s’est déplacé à Espelette pour visiter les premiers logements livrés par un organisme de foncier solidaire. La solution révolutionnaire pour accéder à la propriété en zone tendue.

Accéder à la propriété quand on réside et travaille dans des secteurs où l’immobilier est tendu devient très complexe pour les foyers qui n’ont pas des revenus importants. Conséquence, ces couples investissent loin de leur lieu de travail, contribuant malgré eux à la spéculation des centres urbains et aux bouchons matin et soir aux abords des zones d’activités.

Jusqu’à 40 % moins cher

Pour contrer ce phénomène, le Comité Ouvrier du Logement (COL) livre à Espelette cinq logements à des familles qui accèdent à la propriété. Les tarifs cassent l’emballement des prix. « Jusqu’à 40 % moins cher, c’est quelque chose de révolutionnaire », se réjouit le ministre du logement Julien Denormandie. Le montage consiste à rendre l’acquéreur propriétaire des murs, tandis que la collectivité (mairie, office d’habitat… ) reste propriétaire du terrain.

Maïa, qui déballe encore ses cartons, s’enthousiasme. En couple, avec un enfant de deux ans et demi, la vie en appartement à Anglet commençait à manquer de grand air. « Avec notre budget, nous étions contraints d’envisager d’habiter dans les Landes pour avoir un jardin ». À Espelette, le couple a acheté ce logement de 86 m², au prix de 169.000 euros. Outre les mensualités du prêt social auxquels ils sont éligibles, ils paieront une redevance de 94 euros par mois pour l’occupation du terrain. « Grâce à quoi on peut rester vivre au Pays Basque en profitant d’un jardin ! » se réjouit Maïa.

Une première nationale

Cette idée de démembrer le foncier et le bâti dans le projet de propriété « est la seule solution à notre disposition pour réinvestir cet ancien corps de ferme », se réjouit Bertrand Bourrus, président du Comité Ouvrier du Logement, coopérative HLM d’Anglet qui a logé plus de 7 000 familles depuis 1951. Doté d’un organisme foncier solidaire, le COL peut désormais acquérir des terrains ou utiliser ceux qu’il possède déjà pour la mise en place de ces baux réels solidaires. Espelette est la première réalisation sur le territoire national. Paris a décidé de s’y pencher aussi. « 20 structures sont déjà labellisées et 20 autres sont en train d’y travailler », retrace Julien Denormandie. Il a fallu faire évoluer la loi pour imaginer ce modèle inspiré d’expériences étrangères.

Le COL développe aussi le projet Amassade, rue Lespy à Pau dans des conditions comparables avec une dimension habitat participatif. Ses 15 logements seront livrés fin 2020. « Pau est une zone moins tendue, mais il s’agit justement d’anticiper les mécanismes spéculatifs de centre-ville », explique Bertrand Bourrus, Président du COL.

D’autres projets sont en préparation sur la Côte Basque, en Gironde, à Bordeaux ou à Toulouse. « C’est un dispositif qui change le rapport à la propriété. Mais la preuve est faite que la propriété du sol n’est pas fondamentale, tant qu’on en garde l’usage » analyse Marie-Noëlle Lienemann sénatrice et ancienne ministre socialiste du logement, également curieuse de cette première à Espelette.