Imprimer la page
Vie locale

QUI sont-ils ? Épisode 18

© Archives LPA

Épisode 18. Ils ont donné leur nom à une avenue, une rue, ou un lieu de notre territoire. Des noms qui nous sont devenus familiers au fil du temps, mais dont nous ignorons tout ou presque. Partons à la découverte de ces hommes au parcours souvent hors du commun.

Jean de Gassion © DR

Deux rues à Pau et Audaux portent son nom. Né à Pau en 1609 dans une famille calviniste, Jean de Gassion s’impose très tôt comme l’un des plus fougueux chefs militaires du XVIIe siècle. D’abord engagé dans les dernières révoltes protestantes, il rejoint après la paix d’Alès les armées de Gustave- Adolphe de Suède. Il y découvre la charge de cavalerie au galop pour rompre les rangs adverses, tactique qu’il ramènera en France et qui fera sa renommée. Rentré au service de Louis XIII, le Béarnais obtient une commission exceptionnelle pour lever un régiment de 1 600 hommes, qu’il commande avec l’autorité d’un colonel étranger. Cette liberté d’action, rare dans le royaume, traduit la confiance qu’on lui accorde autant qu’elle inquiète la cour. Toujours en première ligne, il se distingue au siège de Dole, réprime la révolte des nu-pieds en Normandie, puis joue un rôle décisif à Rocroi en 1643 aux côtés du jeune Prince d’Enghien. Sa fougue lui vaut alors le bâton de Maréchal de France, à seulement 34 ans. Jean Gassion accumule exploits et duels, au point que Richelieu le surnomme « La Guerre ». Il meurt en 1647 lors du siège de Lens, laissant l’image d’un guerrier intrépide, indiscipliné et légendaire.

Jean-Louis Tinaud © DR

Une fois n’est pas coutume, c’est un stade qui est baptisé de son nom, à Ogeu Les Bains. Né en 1910 à San Juan (Porto Rico), Jean-Louis Tinaud grandit au sein d’une famille de notables et suit un brillant parcours académique, d’HEC à un doctorat en droit. Avocat spécialisé en droit international des affaires, il entre en Résistance durant la Seconde Guerre mondiale, un engagement salué par la Légion d’honneur. Élu Député MRP des Basses-Pyrénées dès 1945, il se fait remarquer comme Rapporteur de la loi sur la répression des faits de collaboration. Bien ancré localement - Conseiller municipal de Pau pendant près de vingt-cinq ans et Conseiller général durant presque deux décennies - il s’impose comme une figure politique régionale. Après la perte de son siège de Député, il rejoint le Conseil de la République, puis le Sénat, où il défend des positions conservatrices, notamment en matière fiscale et d’organisation des entreprises nationalisées. Dès les années 1950, il se tourne vers la diplomatie : membre de la délégation française à l’ONU et désigné Ambassadeur extraordinaire en Amérique latine, il gagne une reconnaissance internationale. Secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement en 1969, il quitte la politique en 1974 et retrouve le Barreau de Paris où il exerce des activités de conseil aux entreprises. Figure du centre droit, il accompagne la fondation du RPR en 1977. Jean-Louis Tinaud s’éteint en 1990 à Saint-Cloud.

Léon Say  © DR

Une avenue à Pau lui rend hommage. Né à Paris le 6 juin 1826 au sein d’une célèbre famille d’économistes, Léon Say s’impose comme l’une des figures majeures de la vie politique et financière de la fin du XIXe siècle. Petit-fils de Jean-Baptiste Say, il débute dans la banque avant de rejoindre la direction de plusieurs compagnies ferroviaires, puis se tourne vers le journalisme au Journal des débats, où il se fait remarquer par ses critiques de la gestion d’Haussmann. Entré en politique en 1869, il est élu Député en 1871 et devient la même année Préfet de la Seine. Ministre des Finances à de multiples reprises sous la Troisième République, Ambassadeur à Londres, Président du Sénat, puis Député des Basses-Pyrénées (aujourd’hui les Pyrénées-Atlantiques), Léon Say occupe sans relâche des postes clés jusqu’à sa mort en 1896. Parallèlement, il enseigne les finances publiques à l’École libre des sciences politiques, est élu à l’Académie des sciences morales et politiques puis à l’Académie française. Exécuteur testamentaire de Victor Hugo aux côtés de Léon Gambetta et Jules Grévy, Président de sociétés savantes, il laisse l’image d’un libéral assumé, résumant sa pensée d’une formule restée célèbre : « La charité a des limites, mais le bon placement n’en a pas ».

Pierre Bourdieu © DR

Une multitude de lieux célèbrent son nom, un Collège à Mourenx, une rue à Morlaàs et l’Institut de travail social à Pau. Pierre Bourdieu (1930-2002) demeure l’une des figures centrales de la sociologie contemporaine. Né dans un milieu modeste à Denguin, il s’impose par un parcours scolaire brillant qui le conduit à l’École normale supérieure. Après un début de carrière en philosophie, son séjour en Algérie durant la guerre marque un tournant décisif : il s’oriente vers la sociologie et publie ses premiers travaux majeurs sur la société algérienne. Son oeuvre se structure autour de quelques concepts devenus incontournables : l’habitus, qui désigne les dispositions intériorisées guidant l’action ; les champs, espaces sociaux où se jouent des rapports de force ; et la violence symbolique, mécanisme par lequel les dominants imposent leurs normes comme légitimes. Avec La Distinction, classé parmi les ouvrages sociologiques les plus influents du siècle, le Béarnais montre comment les goûts culturels participent à la reproduction des hiérarchies sociales. Professeur au Collège de France, éditeur engagé, fondateur de revues et de collections, il occupe une place majeure dans la vie intellectuelle française. Dans les années 1990, il devient l’un des critiques les plus virulents du néolibéralisme et un soutien actif des mouvements sociaux. À sa mort, Pierre Bourdieu laisse une œuvre immense, dont l’influence reste aujourd’hui déterminante. Il est enterré avec son épouse à Paris au Cimetière du Père-Lachaise.