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Vie quotidienne

Le harcèlement scolaire

Le harcèlement touche chaque année près de 700 000 élèves, soit 1 jeune sur 10© Rido - stock.adobe.com

Le harcèlement touche chaque année près de 700 000 élèves, soit 1 jeune sur 10© Rido - stock.adobe.com

Adopté le 24 février dernier par le Parlement, un nouveau texte de loi qualifie désormais le harcèlement scolaire comme un délit spécifique, permettant ainsi de faciliter le dépôt des plaintes et d'accélérer les procédures judiciaires. 

Une loi nécessaire 

Parce que l’école doit être un lieu où l’on apprend et où l’on découvre le monde sereinement, sans avoir à subir le harcèlement de qui que ce soit, les parlementaires français ont – enfin – pris la mesure de cette réalité qui touche chaque année près de 700 000 élèves (rapport parlementaire du 13 octobre 2020), soit 1 jeune sur 10. La loi publiée au Journal Officiel du 3 mars 2022 crée donc un nouveau délit de harcèlement scolaire dans le Code pénal. 

Qu'est-ce que le harcèlement scolaire ? 

« Aucun élève ou étudiant ne doit subir de faits de harcèlement résultant de propos ou comportements, commis au sein de l’établissement d’enseignement ou en marge de la vie scolaire ou universitaire et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de dégrader ses conditions d’apprentissage », voilà ce que rappelle l’article L. 111-6 de la nouvelle loi. 

Concrètement, sur son site Internet, le ministère de l’Éducation nationale détaille avec précision les modalités du harcèlement scolaire. « Si votre enfant subit de façon répétée des violences verbales et/ou morales (surnoms méchants, insultes, moqueries, brimades, rejets du groupe…), des violences physiques (bousculades, coups), des vols, il est victime de harcèlement ». Cela concerne également le cyberharcèlement, lorsque les agressions ont lieu via SMS, courriel ou sur les réseaux sociaux. 

Le harcèlement scolaire n’a pas d’âge. Un enfant peut être harcelé dès la maternelle (morsures, coups répétés, jouets dérobés, etc.). Il est essentiel de ne pas négliger ces gestes trop souvent associés au simple apprentissage de la vie en communauté. Si ce type de harcèlement n’est pas pris très tôt au sérieux, les conséquences peuvent être graves pour l’enfant, qui peut alors développer une phobie scolaire, une perte de confiance en soi, etc. Les parents et les équipes éducatives doivent faire attention aux nombreux signes du harcèlement (refus d’aller à l’école, colère, insomnies…) afin d’y mettre un terme le plus vite possible.

L’article 222-33-2-2 du Code pénal dit dès à présent que le harcèlement moral désigne « des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie de la victime, se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale ». Pour faire simple, il y a harcèlement moral lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée. Il y a également harcèlement si ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition. 

Les stages de formation civique et de citoyenneté entrent dans le cadre légal du harcèlement scolaire. 

De lourdes sanctions 

La nouvelle loi prévoit dorénavant des sanctions proportionnelles à la gravité que représente le harcèlement. 

Pour les harceleurs mineurs, les sanctions sont avant tout éducatives (travail d’intérêt général, amende, etc.). En effet, la responsabilité des moins de 18 ans est atténuée, la majorité pénale n’étant pas encore engagée. Pour les moins de 13 ans, la loi considère qu'il existe pour l'enfant, une certaine incapacité de discernement. Les sanctions sont donc adaptées en fonction de l’âge du mineur.

Pour les majeurs, le harcèlement scolaire est maintenant puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsqu’il a causé une incapacité totale de travail (journée de scolarité) inférieure ou égale à huit jours ou n’a entraîné aucune incapacité de travail. 

Les peines sont portées : 
- à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende lorsque les faits ont causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ;
- à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 € d’amende lorsque les faits ont conduit la victime à se suicider ou à tenter de se suicider. 

Ce nouvel article est également applicable lorsque la commission des faits se poursuit alors que l’auteur ou la victime n’étudie plus ou n’exerce plus au sein de l’établissement. 

De plus, les faits de harcèlement définis à l’article 222-33-2-2 sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende lorsqu’ils ont été commis sur tout mineur, et pas seulement sur ceux de moins de quinze ans. 

Place à la prévention 

Au-delà de la qualification du harcèlement scolaire comme un délit inscrit au Code pénal, la nouvelle loi met l’accent sur la prévention. Le texte impose aux établissements scolaires et universitaires, publics et privés, qu’ils prennent « les mesures appropriées visant à lutter contre le harcèlement. » Il s’agit de prévenir l’apparition de situations de harcèlement, de favoriser la détection des problèmes, d’y répondre rapidement, de soutenir les victimes avec un accompagnement approprié et de prendre également en charge les auteurs du harcèlement. Le cyberharcèlement est particulièrement cité par la loi tant le digital occupe une place prépondérante chez les jeunes. Il existe des plateformes telles que Non au harcèlement (https://www.education.gouv.fr/non-au-harcelement) et Net écoute (appel au 3018) pour protéger les mineurs contre les violences numériques.

Le numéro 3020 est également disponible en cas de harcèlement scolaire. Joignable du lundi au vendredi, de 9 h à 20 h (sauf jours fériés) et le samedi, de 9 h à 18 h, cette plateforme a pour vocation d’offrir un service d’écoute et de conseils.

Que faire en cas de harcèlement ?

Si votre enfant vous rapporte régulièrement des incidents à son égard, il est important de ne pas les prendre à la légère et d’identifier le plus rapidement possible la source du malaise. En tant que parents, il n’est pas de votre ressort de réprimander directement l’agresseur. Vous devez impérativement prévenir l’équipe éducative afin que des mesures soient prises immédiatement. Enfin, vous avez la possibilité de déposer une main courante ou une plainte contre le ou les auteurs du harcèlement (un mineur peut d’ailleurs engager lui-même l’ensemble de ces procédures s’il le souhaite).

Tous concernés 

Lorsqu’on parle de harcèlement scolaire, on attend du personnel éducatif qu’il soit formé et attentif à la question. Cependant, le nouveau texte élargit le spectre des personnes concernées et impose dorénavant que l’ensemble des personnels médicaux et paramédicaux, les travailleurs sociaux, les Magistrats, les personnels d’animation sportive, culturelle et de loisirs, ainsi que les personnels de la Police nationale, des Polices municipales et de la Gendarmerie nationale reçoivent, dans le cadre de leur formation initiale, une formation à la prévention des faits de harcèlement au sens de l’article 222-33-2-3 du Code pénal, ainsi qu’à l’identification et à la prise en charge des victimes, des témoins et des auteurs de ces faits. 

Mieux encore, les établissements scolaires sont tenus d’inscrire dans le projet d’école ou d'établissement, les lignes directrices et les procédures destinées à la prévention, à la détection et au traitement des faits constitutifs de harcèlement. 

Désormais, le harcèlement scolaire sera plus sévèrement puni et tout le monde devra se sentir impliqué et concerné par cette réalité qui dévaste chaque année établissements scolaires, universités et familles.