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Économie

Crise sanitaire : Rencontre avec André Garreta Président de la CCI Bayonne Pays Basque

André Garreta, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bayonne Pays Basque

André Garreta, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bayonne Pays Basque

L’ampleur mondiale de la crise a ses répercussions aux quatre coins de la planète. Et le Pays Basque n’est pas épargné. Pour discuter de cette conjoncture inédite et de la situation économique, nous avons rencontré André Garreta, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bayonne Pays Basque. Entre les nombreuses entreprises qui souffrent et celles (plus rares) qui tirent leur épingle du jeu, il perçoit néanmoins dans ce contexte, une lueur d’espoir pour l’avenir.

LPAPAPBB : Dans un contexte mondial morose, comment se porte l’économie basque ?

André Garreta : Nous sommes dans une situation exceptionnelle qui a engendré une crise économique inédite et brutale. Tout a des répercussions, sur le territoire du Pays Basque comme sur l’ensemble de la planète. Nous assistons à une certaine perte de repères. Sur le Pays Basque, selon notre enquête de septembre 2020, les entreprises déclarent majoritairement une activité inférieure à l’an passé mais 75 % d’entre elles espèrent maintenir leurs effectifs. Les impacts seront au moins jusqu’en février 2021 avec pour principal effet, le gel des investissements.

Le pire est-il derrière nous ou à venir ?

A.G. : Le pire, c’est l’incertitude. Par conséquent, nous observons des comportements attentistes de la part des chefs d’entreprise avec un fort ralentissement des investissements. Aujourd’hui, plus de deux tiers des entreprises enregistrent un chiffre d’affaires en baisse et ils ne savent pas de quoi demain sera fait…

Quelles sont les activités qui souffrent le plus au Pays Basque ?

A.G. : Toutes les activités souffrent, même si bien sûr, certains secteurs sont plus touchés que d’autres. C’est le cas du commerce qui avait connu une tendance positive l’an passé et qui est en forte baisse en 2020, tant en zone urbaine qu’en périphérie. Tout cela engendre des conséquences qui commencent à se faire sentir en termes de trésorerie et d’emploi. L’industrie est un des secteurs les plus touchés. 66 % des chefs d’entreprise ont vu leur chiffre d'affaires diminuer. En particulier dans l’aéronautique. Celui du tourisme a évidemment fortement été impacté avec une activité de - 84 % en avril et - 70 % en mai. Heureusement la fréquentation a été là cet été avec 7,3 millions de visiteurs (un chiffre équivalent à 2019). Ceci grâce aux locaux restés chez eux, à nos voisins du Pays Basque Sud et aux résidences secondaires, présents sur le territoire plus longtemps que d'habitude. Enfin, il y a l'évenementiel, durement touché lui aussi. 88 % des entreprises de ce secteur déclarent des pertes durant le premier semestre. Pour ces entreprises, le carnet de commandes ne se remplit pas et les réserves de trésorerie fondent.

Doit-on craindre une vague de dépôt de bilan fin 2020 ou début 2021 ?

A.G. : Aujourd’hui les entreprises sont sous perfusion des aides colossales de l'État. Ce qui est à craindre, ce sont les arrivées des échéances avec notamment le remboursement du PGE (Prêt Garanti par l ‘Etat) au mois d’avril. S’il n’y a pas une révision de la règle avec un allongement de la durée de remboursement, le pire est à craindre pour les TPE.

A contrario, quelles sont les activités qui s’en sortent bien ?

A.G. : 13 % des entreprises ont déclaré une croissance du chiffre d’affaires. Dans cette catégorie, il y a des entreprises qui font du commerce en ligne. Mais plus largement, ce sont celles qui ont pu s’adapter aux nouvelles demandes, qui ont pu trouver une certaine propension à faire du chiffre. Enfin, le domaine de la construction apparaît aussi moins touché que d’autres. Les carnets de commande sont restés stables et certaines entreprises envisagent même d’embaucher.

Vous parlez souvent d’un changement de paradigme de l’économie mondiale, la crise actuelle n’en serait-elle pas l’accélérateur ?

A.G. : Je n’ai pas attendu la crise du Covid pour expliquer que demain ne sera pas comme hier ni même comme aujourd’hui. Il ne faut plus envisager la croissance comme elle l’a été pendant des décennies. Nous avons consommé 80 % des ressources naturelles de notre planète et ne pouvons continuer ainsi. On doit aller vers l’économie circulaire, l’intelligence augmentée… de nouveaux modèles que nous devons inventer pour partir sur un paradigme différent. En ce sens, je vois du positif dans la crise Covid. Elle nous a permis de mettre l’accent sur la proximité alors que nous avions délocalisé jusqu’à la production des médicaments dont nous avons créé les licences. Le résultat, ce sont ces pays ateliers qui en profitent désormais. Alors que dans le même temps, nous n’étions plus en capacité de produire des éléments aussi basiques que des masques en papier. Il nous faut donc bâtir de nouveaux modèles, développer et investir de manière durable afin que la planète et l’ensemble des citoyens s’y retrouvent. Cela pour retrouver une vision plus saine et plus respirable pour tout le monde.